Sous Culture et l’humanité au temps du coronavirus

de Nana Bruce-Amanquah et Faty-Sharon Sylla

Voilà deux mois maintenant que le monde et nos vies se sont arrêtés. Covid-19 a touché chaque coin du monde et comme il est transmis d’une personne à une autre, la plupart des gens ont commencé à rester chez eux et réduire le contact physique avec les autres. Beaucoup d’entre nous peuvent compter le nombre de personnes avec qui nous avons parlé face à face — pas à travers un écran—sur une main. Nos amis nous manquent, les membres de nos famille nous manquent. Avec l’isolation ou même les restrictions de déplacements et de regroupements, le moment est venu pour nous tous de réfléchir à la manière dont nous traitons les autres. 

Depuis avant le début de la quarantaine, la chaîne YouTube Sous Culture a essayé de cultiver les discussions profondes qui nous encouragent à réfléchir et même guérir nos relations avec les autres. Établie à la fin de 2019, Sous Culture se décrit comme une chaîne qui “[fait] des vidéos centrées sur l’humain, qui défient la bien-pensance, relient les gens et inspirent l’amour”. Leurs vidéos centrées sur l’humain comprennent principalement les conversations sur les clichés, c’est-à-dire des stéréotypes qui sont formés autour un groupe spécifique. Dans ces vidéos, Sous Culture choisit quelques individus qui s’identifient avec un certain groupe ethnique, un genre, une religion, une orientation sexuelle ou quoi que ce soit d’autre de spécifique, et ces personnes discutent les clichés et les stéréotypes dont leur groupe sont la cible. L’une de première vidéos sur la chaîne s’intéresse aux femmes noires. Avec un titre comme “LES FEMMES NOIRES SONT PAS BELLES !?” et le fait que ce sont des femmes noires qui animent la conversation pendant une vingtaine de minutes, ce n’est pas une surprise que la vidéo a plus de 270,000 vues. L’idée d’un titre assez provocateur est donc reprise pour d’autres vidéos de la chaîne. On y trouve notamment “LES NOIRS SONT INFIDÈLES !?”, “LES ARABES SONT DES VOLEURS !?” ou plus récemment, “LES INDIENS ET PAKISTANAIS MANGENT QUE DU CURRY !?”.

Oui, les clichés sont ridicules mais ils enclenchent des conversations importantes. Que l’on veuille l’admettre ou pas, ces idées fortes ont toujours un impact sur nos relations avec les autres, et même avec nous-mêmes individuellement. Au début de chaque vidéo, les participants se présentent, puis on leur pose des clichés comme celui que l’on retrouve dans le titre et chaque personne utilise une carte bleue pour exprimer son accord ou une carte rouge pour exprimer le contraire. Souvent, il y a une opposition dans les idées comme “les femmes noires sont pas belles” ou “les noirs sont infidèles” mais ce n’est pas toujours un consensus. Même entre ces individus qui s’identifient comme membres d’un même groupe, il y a les points de vue différents. Dans la vidéo avec les hommes noirs par exemple, les opinions des quatre hommes ne concordent pas sur les clichés comme “les hommes noirs ont un gros sexe” ou, “les hommes noirs sont infidèles”. Pour le premier, trois hommes disent que c’est vrai mais aussi une image perçu, même quelque chose dont un homme noir peut être fier. Le participant qui n’est pas d’accord dit cependant que c’est juste une rumeur qui instrumente les hommes noirs comme de simples objets sexuels. C’est presque pareil quand on dit “les femmes noires sont pulpeuses” — cette idée réduit l’image de “la femme noir” à rien d’autres que ses seins, ses lèvres et ses fesses. Ce stéréotype entraîne souvent un complexe chez ces femmes noires qui ne possèdent pas cette “forme idéale” et qui risque de se sentir comme s’il leur manquait quelque chose, comme elles n’étaient pas “assez noire”. Nous voyons comment ces clichés peuvent blesser les individus dans les groupes ciblés ou peuvent même d’être dangereux. Quand on entend que “les femmes noires sont toujours en colère” ou que “les hommes noirs et/ou arabes sont des voyoux”, il faut se rappeler que ces idées sont utilisées pour justifier le mauvais traitement dont ces groupes sont victime , et ce même de la part des forces de l’ordre. 

On peut voir ce mauvais traitement envers les personnes asiatiques en particulier en cette période de pandémie globale. Dans la vidéo appelée “Coronavirus: Réactions des asiatiques aux commentaires racistes”, quelques personnes asiatiques discutent des clichés contre leur groupe ethnique. Ils ont parlé de choses assez triviales comme les préjugés sur les hommes (les stéréotypes comme avoir un petit sexe ou n’être pas attirants) et les femmes asiatiques (les idées comme n’être que des fantasmes, des objets). Ils ont aussi parlé des commentaires dont ils ont été témoins ou même victimes pendant la pandémie. Il ne faut pas chercher très loin pour trouver les exemples de racisme contre les asiatiques en ce moment. Sous Culture est une tribune parfaite pour déconstruire ces commentaires et comprendre leur impact sur les personnes qui reçoivent cette haine, soit l’individu asiatique dans le métro dont les autres se tiennent à distance, ou les médecins et les aides soignants qui sont assaillis de moqueries. Quelques participants ont parlé de leur peur pour leurs amis, leurs parents, leurs petits frères et sœurs qui doivent faire face à la fatigue constante des incidents racistes. Dans toutes les vidéos, on doit comprendre, non seulement les idées derrière les clichés mais aussi leur influence et leur pouvoir. C’est normal de juste essayer de repousser les clichés mais malheureusement, ils sont toujours perpétués. On les voit et entend dans les commentaires et la désinformation sur les réseaux sociaux, dans les médias professionnels, dans les transport, dans la rue…c’est trop omniprésent pour dire que l’on ne doit pas y faire attention. Tout le monde a peur de l’incertitude du moment actuel, et à cela s’ajoute la violence des instruments étatiques à laquelle les personnes racisées font face tout les jour, en parti à cause de ces clichés et idéaux racistes. C’est le moment d’exprimer de la sympathie et de la solidarité particulièrement aux personnes avec qui on ne s’identifie pas forcément. Il est temps que nos communautés individuelles s’unissent. 

Toutes ces conversations font penser aux café discussions que Aïcha Condé de l’ASPA a fait ce semestre sur les sujets d’amour noir, la beauté et l’afro-féminisme, et la santé mentale. La Grande Afrique est d’ailleurs reconnaissante d’avoir pu aider avec l’organisation de la discussion sur la beauté et l’afro-féminisme. Ces discussions apportent la possibilité d’être honnête les uns envers les autres et d’avancer à la fois comme des individus à part entière et ensemble, telle une communauté. Les café discussions et les vidéos de Sous Culture sur les clichés, les témoignages, et cetera sont nécessaires. Ils nous aident à réfléchir et à changer notre manière de penser quand celle ci risque de nous affecter négativement et les personnes autour de nous. Dans une époque telle que celle que nous traversons actuellement, se rappeler de notre humanité et de celle des autres est hyper-important. 

La vision de Sous Culture est “d’inspirer une génération de décideurs“. Certes, il y a les facteurs sociologiques, culturels, économiques, et politiques qui ont une influence sur nos relations mais à la fin, c’est nous, en temps qu’individus qui décidons comment agir envers ou communiquer avec d’autres personnes. Pour reprendre la façon de conclure dans les vidéos de Sous Culture, voici “le mot de la fin” pour cet article: nous sommes heureusement tous capables d’apprendre, d’échanger, et avec un peu de chance, de changer. Alors faisons-le. 

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