Djibouti, point d’entrée africain de la Nouvelle Route de la Soie

La Nouvelle Route de la Soie est un projet de création de voies maritimes et terrestres impulsé par le président chinois Xi JINGPING en 2013. La Chine entend développer ses axes

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Par Malik Samb.

La Nouvelle Route de la Soie est un projet de création de voies maritimes et terrestres impulsé par le président chinois Xi JINGPING en 2013. La Chine entend développer ses axes et flux commerciaux à travers six voies principales, reliant l’Empire du Milieu au Moyen Orient, à l’Eurasie, à l’Europe, mais aussi à l’Afrique. Si les relations sino-africaines engagées dans les années 1960 reposaient sur une idéologie contestataire de l’ordre mondial, leur nature change dans les années 1990 avec la proposition en cinq points du président Jian ZEMIN, qui entend alors refonder les relations entre la Chine et l’Afrique sur une base de  partenariat économique et de développement.

La République de Djibouti occupe une place de choix au sein de ce projet. En effet, la position stratégique du petit Etat de 28 000 km² et 900 000 habitants a joué pour beaucoup dans la multiplication des investissements chinois sur son territoire. Idéalement situé le long du Golfe d’Aden, sur les rives de la mer rouge, Djibouti constitue le point d’entrée vers plusieurs régions sensibles du monde : le Yémen, ainsi que le reste de la péninsule arabique et la Somalie. Depuis l’indépendance, la France a maintenu sa présence militaire dans son ancienne colonie. Aujourd’hui, Djibouti, constitue la base arrière de nombreuses puissances engagées dans la Corne. Les États-Unis y sont installés depuis 2002 dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, le Japon a également une base navale installée à Djibouti, une première pour le pays du Soleil Levant. C’est dans ce contexte que la Chine a annoncé en 2016 la construction d’une base navale, qui lui permettrait, en accord avec le gouvernement Djibouti, de maintenir la présence de près de 10 000 soldats chinois jusqu’en 2026.

La construction de la base navale chinoise, bien accueillie par les autorités djiboutiennes, reste néanmoins controversée et pourrait témoigner des prémisses d’un « interventionnisme chinois » sur le continent africain. Il reste toutefois que la NRS se projette dans une vision de développement entre la Chine et les pays associés. En effet, la Chine est l’un des principaux partenaires au développement de l’Afrique depuis les années 1970. Ainsi, de 1957 à 1989, l’aide chinoise au continent a été évaluée à près de 4,9 milliards de dollars.

Présentée comme un véritable échange « gagnant-gagnant », l’investissement chinois en Afrique tient à se distinguer de l’aide occidentale en mettant l’accent sur les « bénéfices mutuels » du projet et l’absence de conditionnalités, notamment démocratiques, imposées aux pays africains. Cependant, la nature asymétrique de la relation n’a pas complètement disparue, car l’Afrique continue de recevoir.

L’objet de cet article serait d’analyser dans quelle mesure la NRS témoigne du passage d’une aide au développement à un partenariat véritablement « gagnant-gagnant » pour l’Afrique .

L’Afrique, “nouveau terrain de l’interventionnisme chinois ?”

De nombreuses critiques ont émergé suite à l’installation de la base militaire chinoise à Djibouti, y voyant le signe d’une potentielle alliance stratégique en matière de sécurité. La Chine deviendrait-elle un nouvel acteur de la sécurité en Afrique ? Le nombre de soldat que la base chinoise peut accueillir impressionne (10 000). Cependant, il convient de rappeler que la base djiboutienne est l’unique base chinoise sur le continent, tandis que la France en compte plusieurs, au Gabon et au Sénégal par exemple. De plus, le président Xi JINPING a précisé que cette base servirait uniquement à la protection des navires chinois naviguant le long du détroit de Bad-el-Mandeb, ainsi qu’à l’exfiltration de ressortissants chinois.

S’agit-il d’un simple discours ? En effet, la Chine a réaffirmé sa volonté à appuyer les actions de l’Union Africaine et d’autres organisations sous-régionales dans les enjeux sécuritaires et les initiatives de paix sur le continent. Cette affirmation a été confirmée par l’octroi d’une aide de 60 million de dollars sans contrepartie aux entreprises “d’Architecture africaine de paix et de sécurité”. Il convient également de rappeler que l’un des principaux fondements du partenariat entre la Chine et l’Afrique, dès l’avènement des indépendances, repose sur une affirmation du respect de la souveraineté et une impérieuse non-ingérence dans les affaires internes. Cette posture, en opposition à l’aide libérale occidentale, est un pilier de la relation sino-africaine. Ainsi, la Chine à continuer à soutenir le régime d’Ismaïl Omar Guelleh à Djibouti malgré le durcissement du régime à la suite des échos des printemps arabes dans le pays. La Chine ne s’est pas prononcée lors de la turbulente élection présidentielle kényane qui opposait Odinga à Kenyatta. Enfin, la répression des oromos par le régime éthiopien n’a pas fait l’objet de critiques de la part de la Chine.

Ainsi, le rôle de “gendarme” de la Chine en Afrique, s’il existe, semble émancipé de tout discours normatif à l’égard de la démocratie sur le continent. La présence chinoise à Djibouti, au plus proche des grandes puissances mondiales, lui permet de se positionner sur le continent et sur la scène internationale comme un acteur de poids.

Une véritable volonté de développement ?

 La présence de la Chine à Djibouti génère de nombreux avantages pour la petite république de la Corne. En effet, le projet de la NRS booste les investissement chinois à Djibouti comme en témoigne la construction de la nouvelle gare de Djibouti-ville, qui va de pair avec la construction de la voie ferrée reliant Djibouti à Addis-Abeba. Ce projet, financé à hauteur de 530 millions de dollars par la Exim Bank of China n’enthousiasme pas le FMI, qui s’inquiète des taux d’endettement de Djibouti. Mais le projet de voie ferrée profite non seulement à Djibouti, mais aussi à l’Ethiopie qui depuis son conflit avec l’Erythrée ne bénéficie plus d’accès maritime. Les exportations éthiopiennes transitent maintenant vers le port de Djibouti via ce chemin de fer qui relie les deux capitales en dix heures. Les infrastructures chinoises (chemins de fer, construction d’une zone franche et modernisation du port de Djibouti) permettent à Djibouti de se voir en hub maritime et logistique régional. Ces investissements chinois compense alors le désintérêt des autres puissances présentes sur le sol djiboutien pour son développement, notamment le désintérêt de la France qui aurait “raté le coche” en se limitant à son seul aspect stratégique.

La Chine est devenue l’un des partenaires privilégiés des pays Africains. Si l’Afrique de l’Est et Djibouti représentent les points d’entrée de la NRS, le projet vise le continent tout entier. En effet, le chemin de fer reliant Djibouti à Addis-Abeba n’est qu’un projet parmis d’autres, notamment la création de voies fluviales navigables entre le lac Tanganyika, les rivières du Congo et les ports de l’Océan Atlantique d’Angola et du Sénégal. La Chine assume son rôle de principal partenaire économique de l’Afrique, et la présence chinoise sur le continent semble mieux perçue par les Africains. Comme le montre le rapport de l’organisme Pew Research Center de 2013, la présence chinoise en Afrique est perçue plutôt favorablement. Effectuée sur un panel de différents États du continent, en moyenne 67,5% des habitants de ces Etats ont un avis favorable sur la Chine, près de 72% de la population de ces Etats sont favorables à un partenariat avec la Chine et 67% voient la Chine non comme un ennemi mais comme un ami. La Chine, se présentant comme une alternative à l’aide occidentale au développement, insiste sur le volet “win-win” du projet de la NRS, et sur le respect de la souveraineté des pays africains à travers une aide sans conditions. Ainsi, l’Afrique, et notamment Djibouti, le Kenya et l’Ethiopie, trouvent avantage à ce « pivot » dans leur partenariat au développement.

Un développement “gagnant-gagnant” ?

La nature hybride de la politique d’aide de la Chine, entre dons, prêts, remises d’emprunts et allègements de dettes est difficile à appréhender. Deborah Bräutigam, professeur à la American University of Washington explique que si l’aide chinoise est bien de nature développementale, elle se différencie de l’aide au développement occidentale. En effet, la Chine ne se considère pas comme un pays donateur et préfère parler de coopération Sud-Sud, et de partenariat “gagnant-gagnant”. La Chine investit en Afrique via la Exim Bank, qui accorde des fonds aux pays demandeurs après examen des projets, et qui sert ensuite d’intermédiaire pour les remboursements des emprunts. Ainsi, cette banque finance des projets sur l’ensemble du continent, de l’île Maurice à la Namibie, de la Sierra Leone au Kenya. Il demeure difficile de différencier ce qui s’apparente à de l’aide pure ou à un investissement de la Chine en Afrique. Dans le but de mesurer l’ampleur des investissements chinois en Afrique, les équipes du College Willam&Mary de Williamsburg en Virginie ont développé une base de données internationale. Ainsi, on se rend compte que la plupart des financements de la Chine en Afrique concernent des prêts ou subventions de projet. La part des subventions et investissements est beaucoup plus importante que celle des dons et annulation de dettes.

Du paternalisme au partenariat ?

 Si la Chine a de nombreuses fois accordé des remises et allongements de délais de remboursement au pays africains, il viendra un temps où il faudra payer. La relation entre les différents gouvernements africains et la Chine a permis aux Etats de s’enrichir, mais qu’en est-il des populations ? Les échanges sino-africains ont eu des impacts concrets sur les ménages africains, avec notamment l’arrivée de produits chinois manufacturés sur les marchés des grandes métropoles africaines, de Dakar à Cotonou, d’Abidjan à Kigali. Cependant, cette relation semble à sens unique, car les “cultures africaines” ne semblent pas avoir pénétré les vies de chinois sur le continent. En effet, les quatre mille ressortissants chinois de Djibouti vivent entre eux et ne semblent pas s’adapter au mode de vie djiboutien. La NRS présente tous les avantages d’une partenariat “gagnant-gagnant”. La Chine trouve un continent réceptif à ses volontés d’investissement, tandis que le continent Africain trouve en la Chine un investisseur peu regardant, répondant à leurs besoins en infrastructures. Cependant, l’asymétrie entre le “géant chinois” et certains pays d’Afrique inquiète les observateurs. Comment les gouvernements africains vont-ils parvenir à rembourser leurs dettes ? Comment justifier l’imposition d’un nouveau modèle développementaliste en Afrique ? Qu’en est-il des populations ?

Au delà d’un basculement vers un nouveau modèle économique, il s’agit de repenser le modèle politique qui y est associé. Un modèle qui encouragera l’unité du continent pour ne pas suivre la Chine, mais l’accompagner. Il revient à l’Afrique elle-même de se retrouver autour de ce qui fait ses Communs. Il revient aux autorités politiques d’appréhender au mieux ce qui permettra à l’Afrique de se positionner en tant que partenaire souverain et égal. La nature des relations sino-africaines soulève également la question du rôle de l’Union Africaine, qui devrait se positionner comme intermédiaire dans les négociations entre les Etats du continent et la Chine. Les populations et acteurs non étatiques se doivent d’être aussi plus associés à la NRS et insistance doit être faite sur la réciprocité des échanges. Si des Instituts Confucius ouvrent en Afrique, alors pourquoi pas des Centres Cheikh Anta DIOP à Pékin ?

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